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21 AGATHOCLEE ALEXANDROWNA POLTORATZRY, 1757 — 1822, ne'e Chichkoff, fille de petits proprie'taires de Tver, naquit le 29 juin 1757. Elle n'avait pas IS ans quand elle fut marie'e a M. Poltoratzky; on raconte que, lorsqu'il vint la demand er, elle etait a jouer к la poupee et qu'on l'envoya chercher par sa nourrice, qui lui dit: „Fe'kloucha, viens: c'est pour te marier!" Belle femme, sensee et bien doue'e, elle avait un caractere de fer et une intelligence superieure des affaires: partie d'une petite exploitation, elle finit par posseder une grosse fortune do 4000 paysans, de nombreuses distilleries et usines de toute sorte, et avoir a bail presque tout le gouvernement de Tver. Et elle ne lisait ni ne signait jamais rien elle-meme: elle avait pour cela un secretaire particulier. C'est qu'etant jeune, elle avait fait un faux testament qui lui avait rapporte l'heritage d'un parent eloigne, et pour lequel elle avait failli etre traduite en justice: elle reussit pourtant a faire etouifer l'affaire et fit des lors le vceu de ne plus toucher a une plume de sa vie. Elle tint parole au point qu'on la croyait illettree dans son entourage meme; sur ses vieux jours effective-ment, elle ne savait plus lire ni ecrire. Tenant completement en mains son mari et ses vingt-deux enfants, elle etait unique maitresse et arbitre du sort de sa nombreuse descendance; tous les membres de sa famille tremblaient devant elle: sa severite, son esprit de domination et parfois meme sa cruaute ne connaissaient point de bornes. Le renom de la „Generale Poltoratzky" se repandit bien au del'a des limites du gouvernement de Tver. A l'avenement d'Alexandre Ier, dit-on, le bruit courut a Petersbourg que l'Empereur, informe de sa tyrannie, donna l'ordre de la fouetter en place publique; elle-meme, en ce moment a Petersbourg, vit un jour, de sa fenetre ouverte, la foule se precipiter: „Ou courez-vous", dit-elle, ,,mes amis?"—„Sur la place, voir fouetter la Poltoratzky!"—„Courez, depechez-vous!" leur cria-t-elle en riant. On a conserve bien d'autres details de la vie et de la mort de cette etonnante femme, exceptionnelle meme en un temps si riche en caractferes. Elle habitait au bourg de Grouzino, a vingt verstes de Torjok, une maison splendide, con-struite par Rastrelli et pourvue de toutes les fantaisies et de tout le luxe des seigneurs de l'epoque, Elle n'avait dans sa chambre qu'une image du Saint-Sauveur et le portrait de Catherine II; du. premier, elle disait: „C'est mon ami", et quant a Catherine, elle l'aimait tant, qu'elle acheta a sa mort tout son linge, ses chemises, ses camisoles et ses draps. Dans nn de ses voyages en Russie, l'Imperatrice vint a Grouzino, mais. pressee et ce jour-fa mal disposee, elle n'entra pas dans la maison et refusa le lait prepare pour elle. Longtemps avant sa mort, a un des nombreux voyages qu'elle fit a Moscou, Mme Poltoratzky versa; on la retira de sous sa voiture meurtrie au point que „tous ses os etaient brises en morceaux et ballottaient comme des noix dans un sac". Privee des lors de l'usage de ses bras et de ses jambes, elle passa le reste de sa vie dans son lit, mais sans cesser de surveiller et de diriger la gerance de ses biens, et personne n'osait desobeir a ses ordres. Ses filles ne pouvaient obtenir le fiance de leur cceur qu'en faisant semblant de se soumettre aux prescriptions de leur mere. Personne de la maison n'osait s'adresser a un autre medecin qu'au hongrois grossier et ignorant qui у habitait, et dans lequel elle avait une entifere confiance. Sa colere etait effrayante: le coupable etait traite de Pougatcheff. parfois meme maudit, fut-ce un de ses fils, Religieuse et croyante, elle fit de nombreux sacrifices pour les eglises et ecoles paroissiales et construisit a ses frais une cathedrale a Staritza. Elle mourut le 22 octobre 1822, et fut inhumee dans l'eglise du bourg de Grouzino. Sentant venir la mort et torturee de cruelles souffrances, elle suppliait Dieu a haute voix de les augmenter encore pour mieux purifier son ame pecheresse. Elle fit porter son lit dans la grande salle des choeurs, ouvrir toutes les portes et les fenetres, et dire a tout le quartier de venir lui dire adieu: puis, en presence d'un immense concours de paysans et de proprietaires du voisinage, elle se mit a confesser publi-quement ses peches, au grand saisissement de tout le monde et termina par un grand cri: ,,Mes freres, pardonnez-moi, parce que j'ai peche!" A quoi l'assistancc repondit d'une seule voix: „Dieu pardonnera", et le pretre donna le viatique a la mourante. (D'apres un original de Levitzky, appartenant a N. Romanoff, St-Pe'tersbourg.)